Le beaujolais, vin de Gnafron et d’Édouard Herriot

Lyon, capitale du culte du vin et de la gastronomie mondiale

Nulle part ailleurs le culte du vin et de la table n’est célébré avec plus de ferveur que dans l’illustre ville de Lyon. Le plaisir de la cuisine atteint dans cette région cette souveraine simplicité, qui dans tout art est le signe même de la perfection. 

Cuisine de grands chefs, de bonnes mères, de parfaits cordons-bleus, qui ne visent jamais à l’effet et qui savent conserver les traditions apprises non pas à l’école ou dans les livres, mais par un sens héréditaire et inné.

À ces causes, les plus fins gourmets et dégustateurs ont proclamé la ville de Lyon capitale de la gastronomie mondiale (cf. Curnonsky). C’est une cité unique où le culte de la bonne chère est une raison de vivre et où le simple repas et pot d’un canut* surpasse de loin toutes les prétentieuses ratatouilles des palaces. 

Cette capitale des canuts est une ville où l’on se demande dès le lundi après le déjeuner : « Et maintenant, qu’est-ce que nous mangerons et boirons samedi prochain lors du déjeuner ? ».  De même entre gones*, il se dit « qu’on ne se connaît pas tant qu’on n’a pas partagé une table et un pot ensemble »

Rouges ou blancs, vins de l’axe nord-sud Lyonnais

Cette région de bonne gastronomie a su de tout temps s’appuyer sur une association entre les plaisirs de la table et de la vigne. Lyon offre dans son axe Nord-Sud les vins rouges et blancs parmi les plus reconnus au monde

Les vins du Lyonnais sont ainsi, au Nord, les exquis vins rouges du Beaujolais et plus localement encore sur la bordure orientale du Massif Central, les charmants vins des Coteaux-du-Lyonnais

Au nord, les vins rouges du Beaujolais

Nulle part ailleurs qu’à Lyon on ne boit autant de bons vins rouges du Beaujolais et on ne sait aussi bien les déguster. La consommation y est telle, que malgré les 1.300.000 hectolitres de vins produits en moyenne dans cette région bacchante, Lyon boit chaque année presque toute la récolte de ces vins frais, fruités, parfumés de fraise des bois et de merises. Aussi la falsification des appellations beaujolaises est monnaie courante et on vend, dans bien des estaminets de Paris et d’ailleurs, un vin anonyme et « bibineux » à souhait. 

Les vins du Beaujolais sont des vins légers et friands, mais peuvent parfois titrer à 13° pour les millésimes exceptionnels. Il faut les boire entre deux mois et deux ans, hormis certains grands crus corsés. En vieillissant, ils perdent vite leur cachet de fruité, de fraîcheur et de friandise. 

Les Beaujolais sont avant tout de merveilleux vins de table et on ne doit surtout pas les chambrer. Le vignoble comprend dix crus classés :

  1. Le Régnié à Beaujeu, vins très corsés se rapprochant de certains Bourgogne rouges de Beaune.
  2. À Fleurie, on récolte des vins plus tendres et féminins ayant une ampleur étonnante et un bouquet accentué de coing. Ce sont des vins friands et très fruités.
  3. À Chénas on développe des vins exquis, tendres, précoces, et délicieusement fruités embaumant la fraise des bois. Ce sont les Beaujolais type consommés dans les bouchons lyonnais.
  4. Brouilly et les Côte-de-Brouilly donnent des vins spéciaux, bouquetés d’églantine, au goût de terroir et excellents à boire entre trois et cinq ans.
  5. Les vins de Chiroubles sont exquis, parfumés, légers, friands et digestifs, mais à boire jeunes.
  6. Quant aux vins de Juliénas, ils sont fruités, capiteux et de robe vive.
  7. Mentionnons aussi les merveilleux vins de Moulin-à-Vent proposant une authenticité avec un extraordinaire bouquet de jujube ainsi que des saveurs ferrugineuses quand ils sont jeunes.
  8. Villié-Morgon développe des vins plus corsés de très bonne conservation et aux arômes de framboise.
  9. Enfin le Saint-Amour, cru au nom charmeur, au corps équilibré et harmonieux, est un vin fin conservant tout le fruit du cépage gamay avec des arômes de kirsch.

Les Beaujolais sont parmi les meilleurs vins rouges de table et les plus agréables à l’estomac ; mais il faut les boire sur place, car ils voyagent fort mal.

Au sud, les Coteaux-du-Lyonnais

Faisons maintenant un grand bon du Nord au Sud en survolant la ville de Lyon. Nous trouvons alors aux portes des Côtes-du-Rhône et de la ville de la soie, des vins rouges et blancs extrêmement différents des crus des Beaujolais avec les Côteaux-du-Lyonnais. Un vignoble local désormais restreint aux portes de cette agglomération mais toujours bien présent dans nos verres.

Millery, Sainte-Foy et Brindas proposent de belles couleurs et sont positionnés à un niveau intermédiaire entre les grands Beaujolais et les Côte-Rôtie. Ils possèdent un suave parfum de framboise plus prononcé que tous leurs voisins.

Gamay & millésimes, le potentiel des Beaujolais et Coteaux-du-Lyonnais

Comment résumer en quelques lignes les merveilles issues de ces vignobles ? Une carte complète des menus et des vins lyonnais exigerait mille pages de texte serré. Malgré cela, le Beaujolais et les Côteaux-du-Lyonnais traînent derrière eux une réputation calamiteuse de vignoble de soif, connu pour ses mauvais primeurs vite bus. La région accumule les casseroles et se paie même le luxe d’avoir également façonné une image vieillotte et ringarde. Le Beaujolais ne peut plus se laisser aller à la facilité ! S’il continue en ce sens, il creuse sa tombe.

Heureusement, les résistants de la qualité montrent la voie en tâchant de s’appliquer, œuvrant avec le goût des vignes et des vins bien faits.  En parallèle, de jeunes producteurs idéalistes et passionnés, se sont sentis pousser des envies de s’installer afin de produire des vins de terroir, ici où la terre est encore abordable.

Il faut que ce mouvement poursuive et aille plus loin, quantitativement et qualitativement : il faut que les meilleurs et plus expérimentés s’efforcent de repousser les frontières ; non pas pour se lancer dans une course effrénée et infantile, mais simplement pour explorer davantage le potentiel du gamay, des terroirs locaux et des meilleurs millésimes.

Petit lexique pour les non-initiés :

  • Gnafron est une marionnette, compagnon de Guignol, amateur et buveur de beaujolais
  • Édouard Herriot (1872-1957), personnage central de la IIIe République, fut également maire de Lyon (1905-1940) et (1945-1957).
  • canut : ouvrier.e de l’industrie de la soie (Lyon)
  • gone : désigne un.e habitant.e de Lyon

Merci à Nicolas RIMOUX pour cette tribune.
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