Interview bière au sein de La Nouvelle Cave.

Jean Baptiste, manager des 2 boutiques La Nouvelle Cave à Paris, et Tristan, caviste et responsable de l’assortiment bières nous ouvre les portes leur boutique Rue de Turbigo.

Bonjour Jean Baptiste, peux tu nous parler du concept de La Nouvelle Cave ? 

Jean-Baptiste, mananger des boutiques de La Nouvelle Cave avec l'un de ses champagnes favoris.

C’est un concept qui a été lancé par la pole Casino Franprix, et plus précisément par le pole innovation.  Au début l’idée était que notre assortiment dépendait des achats de Cdiscount, et nous étions donc la continuité du pole vin de la plateforme. 

Quand on a commencé on avait en boutique les prix internet de Cdiscount, et on avait 43% de la gamme qui était à moins de 10€, tout confondu.
On a été challengé assez rapidement par nos clients pour avoir des produits vraiment cavistes. Quand on conseillait un client et qu’on proposait 15-20 références de Languedoc rouge en dessous de 10€, au bout d’un moment on était un peu bloqués.

Donc très rapidement on s’est retrouvé à faire faire des achats en direct, à faire nos propres appros via des grossiste, agents commerciaux, direct… comme un caviste classique !
Maintenant on est toujours financés par le groupe Casino Franprix mais les achats c’est nous qui nous en occupons, on a notre entrepôt sur lequel on stock nos produits.

Est ce que vous avez toujours une partie de votre assortiment commun à celui de Cdiscount ou est ce que vous vous en êtes complètement détachés ?

Alors on se fourni toujours certaines références chez Cdiscount, notamment les petits prix, qui est la partie la plus compliquée à trouver pour un caviste. Et eux le font très bien pour le coup. On se focus sur les petits prix et les rosés. Ce qui représente en volume d’achat aux alentours de 20% de notre sélection. 

Mais on a un autre biais qui fait qu’on a besoin de cet approvisionnement, on travaille beaucoup sur Deliveroo et Uber. On fait une bonne partie de notre chiffre sur ces 2 plateformes, au travers de nos boutiques, mais aussi de nos différents darkstores situés un peu partout en France. En boutique physique on a aucun problème à switcher de référence, mais quand on a une dizaine de darkstores avec une référence, on ne peut pas se permettre d’être en rupture de stock.
C’est pour ça qu’on a toujours ce double-sourcing.

Ici on a envie de toucher une clientèle la plus large possible, on a cette volonté de dépoussiérer l’image du caviste traditionnel, et de proposer quelque chose de nouveau.  Et ça passe aussi par le sourcing.  Personnellement je suis très sensible aux vins natures, mais comme on est plusieurs à sourcer, on essaye de toucher un peu à tout type de vin, en évitant quand même l’ultra conventionnel, mais sans faire l’impasse sur les incontournables.

Ici par exemple on a une grosse appétence champagne, on a presque “trop” de références par rapport à notre demande actuelle, on arrive à avoir des parcellaires de Marguet, Paillard, Maillart… Mais sans taper dans le trop haut de gamme non plus. Proposer des Petrus et des Romanée Conti c’est pas mon objectif. Je sais très bien qu’un client qui recherche ce type de vin ne viendra pas chez moi.
L’idée est plutôt d’être prescripteur de petits domaines, peu diffusés.

Fais tu toujours face à des a priori des confrères cavistes du fait que tu sois rattaché au Groupe Franprix Casino ? 

Toujours oui ! 
Et j’invite ces personnes là à venir en cave ! Parce qu’en effet quand tu tapes “La Nouvelle Cave” sur internet, le premier résultat qui sort c’est “La Nouvelle Cave by Casino”. On a toujours cette image qui nous colle à la peau et dont on n’arrive pas à se détacher.
Malgré ça aujourd’hui cette appartenance à ce groupe reste une grande force, puisque nous sommes un centre de recherche et développement pour le groupe.

À tous mes confrères cavistes qui me disent que nous sommes de la GD, je leur demande simplement : « Est ce que de la GD arrive à avoir des allocations ? Faire venir des vignerons ? Réaliser des collaborations avec eux ? « 
J’ai un ami vigneron en champagne avec qui on a fait une collaboration avec un vin et une étiquette spécifique pour La Nouvelle Cave produite à 240 bouteilles. Ce qui peut être beaucoup pour un caviste traditionnel, mais pour de la GD c’est rien.

Pour se rendre compte que nous sommes des vrais cavistes, il suffit de passer le pas de la porte ! 🙂

Tu m’as mentionné que vous avez une prochaine cave qui ouvre rue de Grenelle, est ce que vous avez comme ambition d’ouvrir en dehors de Paris ? 

C’est quelque chose qu’on a en tête oui ! Je ne pourrais pas te dire quand, on veut prendre notre temps, mais ce n’est pas impossible qu’on ouvre un jour en dehors de la capitale.

Bonjour Tristan, peux-tu nous présenter un peu votre méthode de sélection des bières ici à la Nouvelle Cave ? 

L'assortiment actuel de bière chez La Nouvelle Cave

Le référencement des bières c’est comme le reste des produits à la nouvelle cave, l’idée c’est d’avoir des choses assez consensuelles, assez classiques, et des choses plus pointues.

Sachant qu’on a pas mal de canaux différents, le but c’est que tout vive.

Pour revenir au début, comme pour le reste, nos bières étaient uniquement des références présentes chez Cdiscount, sur un seul fournisseur.
Et puis on s’embêtait un peu, on avait envie de faire autre chose, et on a commencé à faire des bières un peu plus crafts, et tester la réaction des clients à ces nouveaux produits.

En effet les cavistes classiques ne sont pas spécialisés en bières, on est parti de 0, et à force de montrer aux gens et de leur faire découvrir, on créer une clientèle bière chez un caviste.

On est parti au début sur des styles New England Ipa, sur des petits brasseurs en Europe, puis au fur et à mesure que la demande augmentait, on est allé chercher d’autres gros fournisseurs qui rassemblent plusieurs brasseries, et on a commencé à travailler également avec des brasseries en direct. 

Dans l’idée de toujours pouvoir retrouver des bières à petits prix qu’on peut parfois retrouver en GD, parce que le client Deliveroo connait cette bière et veut pouvoir la retrouver sur notre plateforme, on continue de sourcer certaines bières sur Cdiscount, comme pour le vin.
Sur les bières on a aussi un jeu de saisonnalité; pour la saint Patrick on va commander un type de bière, pour Noël aussi, en été on remonte les bières blanches…
On revoit très régulièrement son rayon et sa sélection.

Et donc pour la Saint Patrick qui arrive, tu as commandé des bières en particulier ? 

Alors en ce moment la bière se vend un peu moins, on tourne donc avec ce qu’on a déjà en stock.
L’an dernier on a sourcé des bières exprès pour l’événement et on a remarqué que l’évènementiel sur les bières c’est assez anecdotique. Il ne faut pas s’enflammer sur le référencement sachant que les DLC des bières sont bien inférieures à celles du vin. En 6 mois une bière peut être considérée comme périmée.
C’est vraiment du pilotage de stock.

Par contre, il faut toujours proposer un choix plus large que ce que les personnes attendent, toujours aller un peu plus loin, et ça passe par des bières élevées en fût de chêne, des styles un peu fous, j’ai des bières à la ricotta par exemple !  On les a fait goûter aux gens, et ils ont adoré ça ! Les gens reviennent aussi parce qu’ils savent qu’on a souvent des petites nouveautés comme ça. 

C’est comme pour les consommateurs de vin, il y a des gens qui préfèrent le vin blanc, d’autres le vin rouge, d’autres encore des vins plus naturels.
La bière c’est le même principe, certains vont préférer les bières acidulées, d’autres les IPA…

Et pour rebondir la dessus, ça ne rend pas ton sourcing plus compliqué de devoir jongler avec toutes ces propositions de brasseries ? 

En effet c’est là où le jeu des fournisseurs est important; il y a plein de microbrasseries qui ont plusieurs gammes avec des blondes, des IPA, des sours… Il en faut une ou 2 comme ça, mais il faut arriver à piocher une ou 2 bières par brasserie plutôt que de prendre toute la gamme, pour diversifier l’offre finale au consommateur.

On a actuellement 3 gros fournisseurs, par rapport à 1 au début, ça nous permet de mieux pianoter nos commandes.
Évidemment on a certaines références ou l’on peut se permettre de commander en grande quantité, mais sur l’univers de la craft c’est plus compliqué car ceux sont souvent des éphémères donc en faible quantités.

Et plus globalement sur le marché de la bière, est-ce-que tu ressens une certaine évolution ? 

Oui complètement, la consommation actuelle est un peu ambivalente, il y a 20-30 ans on avait que des brasseries classiques, puis le marché à explosé au niveau de l’offre, tout le monde a commencé à produire des styles de bières du nouveau monde.

Au niveau de la consommation on a remarqué une cassure entre ceux qui achètent leurs bières standards au supermarché et les clients hyper curieux qui cherchent la surprise et la découverte.
Encore que même dans certaines grandes surfaces on peut avoir de belles surprises, je pense notamment à un Auchan qui a une jolie sélection de bières.
Et cela s’explique par le fait que les producteurs de bières crafts en France commencent à faire du volume, comme la brasserie Gallia par exemple.

Maintenant ce qu’une cave à bières ou même nous, essayons de faire, c’est d’aller chercher des choses plus confidentielles, plus rares. C’est là que réside la vraie différence entre la GD et un indépendant.

Et c’est là où on retrouve un peu une similitude entre le vin et la bière, ceux sont ces clients “geeks” souvent très adeptes de vins natures qui veulent tout goûter, et ça demande donc de faire attention à son référencement.

Pour terminer, est ce que tu peux me parler de tes 3 coups de cœur du moment ? 

On va partir sur des bières avec 3 styles différents, 

La première vient d’une brasserie norvégienne qui propose des étiquettes assez dingues, un rapport qualité prix incroyable sur un style vraiment funky.
C’est un type de bière qu’on a peu l’habitude de goûter; les bocks. Elle est en général considérée un peu comme une bière de soif, mais ici elle est torréfiée pour qu’au nez on ait ses arômes de réglisse et caramel. Ça peut en rebuter plus d’un si on aime pas le style des ambrées. Avec un nez aussi puissant on peut s’attendre à avoir une bière lourde et dense mais en réalité on a quelque chose d’hyper désaltérant, léger, et ça se prête parfaitement aux beaux jours qui arrivent.

Assortiment de bières proposé par Tristan

La 2eme est une collaboration entre des montpelliérains, Brewing Bears, et des barcelonais Espiga. Quand on parle de collaboration dans l’univers de la bière, ce n’est pas l’un qui produit et l’autre qui embouteille, il y a un vrai échange de produits, c’est un vrai travail à 2. Et j’ai choisi cette cuvée parce qu’elle représente bien cette tendance aux collabs.
C’est une IPA un peu trouble, style américain, résineux… C’est pour les gens qui aiment vraiment l’amertume. C’est vrai très bien fait.

Et la dernière, ce sont des brassins éphémères de la brasserie Zythologist qui font des bières un peu lambics, sur des styles complètement fous.
Un peu comme la brasserie Cantillon, ils font des choses qui, sur le papier, paraissent complètement loufoques voire horribles. Et dans les faits c’est hyper bon.
Celle-là c’est abricot, cacahuètes grillées et ricotta et sans levurage.

Elle se destine vraiment à des amateurs de produit plus pointu, et on se rapproche beaucoup de l’univers du vin grâce aux acidités du fruit.

Avec ces bières qui surfent un peu sur les mondes du vin et de la bière ont peut obtenir des aromatiques infinies et vraiment se faire plaisir.

Si cet articler vous a plu et que l’avis de producteurs de bières vous intéresse, nous vous invitons à lire celui sur l’iconique brasserie Lyonnaise Ninkasi ou encore la brasserie 100% local Les Tours du Malt basée à Hemp.

Eclair

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